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Motion de censure : neuf voix manquantes

Alors qu’Élisabeth Borne annonçait vendredi l’intention du gouvernement de recourir au 49.3 pour faire passer sans vote leur impopulaire réforme, la tension est montée d’un cran. Mais il n’y a pas que la rue qui gronde, à l’assemblée les élus de l’opposition ont exprimé leur colère face au mépris que représente ce passage en force antidémocratique.

Samedi matin, des manifestants faisaient brûler un 49.3 en bois sur la place de la Liberté à Lons-Le-Saunier (photo: Céleste Robert-Casals)

Une rage palpable à tous les niveaux

Alors qu’Élisabeth Borne annonçait vendredi l’intention du gouvernement de recourir au 49.3 pour faire passer sans vote leur impopulaire réforme, la tension est montée d’un cran. Avec des journées de mobilisation massives, en particulier à Paris mais aussi dans toute la France et ici dans le Jura, où des rassemblements de contestation ont pris place spontanément et durant tout le week-end. Mais il n’y a pas que la rue qui gronde, à l’assemblée les élus de l’opposition ont exprimé leur colère face au mépris que représente ce passage en force antidémocratique.

Employer l'autoritarisme comme ils sont en train de le faire pour passer en force une réforme des retraites dont personne ne veut […] est un signe qu'ils enfoncent le pays tout entier dans une crise de régime. Et nous le disons à [...] ceux qui, au pouvoir aujourd'hui, sèment le chaos dans ce pays, nous répondrons évidemment par la censure.
- Mathilde Panot, présidente du groupe LFI

La contre-offensive parlementaire s’est rapidement organisée, avec notamment une saisine du conseil constitutionnel et une proposition de référendum d’initiative partagée par le groupe NUPES, mais aussi le dépôt de deux motions de censure qui ont été votées ce lundi après-midi. L’une par le Rassemblement National et l’autre par le groupe centriste Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires (LIOT), la France Insoumise ayant retiré la sienne choisissant de soutenir cette dernière.

Une majorité sur le fil du rasoir

Malgré la composition inhabituelle de l’Assemblée Nationale depuis les dernières élections législatives, la censure déposée ce samedi par LIOT a été rejetée à 9 voix près. Comme convenu, l’intégralité des membres des groupes de la NUPES (LFI, Socialistes et apparentés, écologistes et GDR) et des membres du Rassemblement National ont voté pour. Il en est de même pour 18 membres sur 20 de LIOT, un nombre étonnamment élevé étant donné l’hétérogénéité des horizons politiques du groupe.
En fait, le résultat du vote reposait principalement sur les désaccords au sein du groupe Les Républicains dont 19 députés - soit presque un tiers - ont voté pour, et parmi eux une députée jurassienne.

Qu’en est-il de nos députés locaux ?

Sans surprise et à l’instar de tous les membres du groupe Renaissance, Danielle Brulebois , députée macroniste de la première circonscription du Jura, n’a pas voté la motion de censure. Elle s’était de toute façon déjà prononcée en faveur de la réforme des retraites.

Il en est de même pour Marie-Christine Dalloz, députée LR de la deuxième circonscription du Jura qui n’a pas voté la censure. Elle avait exprimé être en faveur de la réforme selon le résultat de la commission mixte paritaire, mais il aurait été peu probable qu’elle censure le gouvernement dans tous les cas.

En revanche et contre toute attente, Justine Gruet, députée du groupe Les Républicains dans la troisième circonscription du Jura a voté en faveur de la motion de censure, malgré les directives du président du groupe, Olivier Marleix qui affirmait:

Non, nous ne nous associerons pas à ceux qui ont pour funeste slogan ’Tout cramer’ ou encore ‘Révolution’, nous ne voterons donc pas les motions de censure.

Bien qu’elle ait exprimé des doutes quant à la réforme, il est surprenant qu’elle soit allée jusqu’à voter contre la majorité de son groupe parlementaire, qui subissait déjà depuis 2017 une perte conséquente d’influence sur la scène politique française et semble funambuler depuis les dernières élections.

Quoi qu’il en soit, et malgré l’adoption de la réforme à l’assemblée, le sort n’en est pas jeté pour autant. Ce passage en force est un véritable aveu de faiblesse et, à l’instar du CPE en 2006, il s’agit maintenant de faire plier le gouvernement par la mobilisation populaire.
La bataille parlementaire est terminée mais la lutte se poursuit dans la rue, dans le Jura comme ailleurs.