Écologie / Jura

Le Lynx, une chance ou une menace pour la bio-diversité ?

Une lettre de l’Association intercommunale de chasse agréée (AICA) de Fournet-Luisans à destination de la fédération des chasseurs du Doubs demandant que cette dernière se porte garante de la régulation du Lynx boréal, a mis le feu aux poudres ce mois de février. Quelle place occupe le Lynx boréal dans les forêts jurassiennes et quel est son impact sur la biodiversité ? Le centre Athénas a t-il raison de s’inquiéter de la position de certains chasseurs ? Voici quelques points de compréhension et pistes de réflexion.

Le Lynx boréal crédit Andyworkspixabaylicence

Une lettre de l’Association intercommunale de chasse agréée (AICA) de Fournet-Luisans à destination de la fédération des chasseurs du Doubs demandant que cette dernière se porte garante de la régulation du Lynx boréal, a mis le feu aux poudres ce mois de février.

Avec un communiqué de presse, le centre Athénas, spécialiste de la conservation du Lynx, a réagi aussitôt:

« ceux qui voulaient se définir comme les premiers écologistes de France redeviennent ce qu’ils sont fondamentalement : des viandards seulement intéressés par le quota de remplissage de leur congélateur. »

Le Lynx boréal a progressivement disparu entre le 17ème et le 20ème siècle suite à la régression des forêts et à la disparition progressive de leurs proies. Ce n’est qu’en 1974 que le Lynx est de nouveau détecté dans le massif du Jura suite à sa réintroduction en Suisse entre 1972 et 1975. Le massif du Jura avec ses forêts et ses montagnes est particulièrement adapté pour le Lynx offrant des avantages en termes de chasse et pour les périodes de repos et la mise bas. Il y aurait une centaine de lynx présents dans le massif jurassien.

Se nourrissant essentiellement de chevreuils et de chamois des Alpes, le lynx rogne sur les proies des chasseurs ce que déplore l’AICA dans sa lettre adressée à la fédération des chasseurs du Doubs « nous sommes très inquiets quant à la pérennité des espèces chevreuil et chamois sur nos territoires de chasse ». Or selon Rebecca Burlaud, cheffe de projet Lynx à la société française pour l’étude de la protection des mammifères (SFEPM), «l’espèce peut être perçue comme un perturbateur ou compétiteur de l’activité de chasse, remettant en cause la gestion du gibier sur les territoires chassés, le manque d’informations scientifiques vient renforcer le poids des anecdotes de terrain et des préjugés sur l’espèce. Néanmoins, le lynx est un prédateur opportuniste généraliste, avec plus d’une trentaine d’espèces de mammifères et oiseaux identifiées présentes dans son régime alimentaire; son régime alimentaire pourrait présenter des variations locales, saisonnières voire individuelles. Plus nous affinerons la description de son régime alimentaire, plus il pourra être considéré comme une espèce jouant un rôle fondamental dans la fonctionnalité écologique des écosystèmes forestiers. »

Le centre Athénas dans son communiqué de presse affirme que « de 2002 à 2021, au minimum 54 lynx ont été tués par braconnage…ces chiffres, bien supérieurs aux chiffres officiels reflètent pourtant une partie seulement de la réalité. » La SFEPM préfère parler de destruction illégale et précise « les destructions illégales sont une réelle menace pour les populations de lynx en Europe, mais sont néanmoins impossibles à quantifier », selon eux, une vingtaine de cas sont avérés sur le territoire depuis le retour du lynx.

La fédération des chasseurs du Doubs a réagi sous forme de communiqué de presse "les chasseurs du Doubs considèrent que toutes les espèces animales ont leur place dans leur habitat. A ce titre, la fédération, qui œuvre au quotidien pour la biodiversité et les habitats de nos territoires, regrette ce positionnement qui ne reflète pas l’opinion du monde cynégétique du Doubs". Contactée, la fédération jurassienne n’a pas répondu.

Si la présence du Lynx dans nos massifs résulte d’un équilibre encore fragile et fait l’objet de fantasmes de tous bords, défenseurs du Lynx et chasseurs semblent s’être mis d’accord sur un projet commun pour la préservation de l’espèce, Ecolynx. Cependant, les velléités de certains chasseurs doivent renforcer notre vigilance collective.